Nieppe : après des années d’intérim chez Delacre, ils réclament
le CDI qui leur est dû
Article de Delphine Tonnerre / publié le 10/02/2015 dans la Voix du Nord
Nous avions évoqué en mai la situation des intérimaires historiques de Delacre, qui n’avaient pas été repris l’an dernier. Une vingtaine d’entre eux ont décidé de réclamer devant les prud’hommes la requalification de leur contrat en CDI et leur licenciement. Une audience aura lieu le 8 avril.
Le mari d’une ex-intérimaire, Jamal Sabaouni, et M e Dominique Bianchi, leur avocat.
Cette usine, Jamal Sabaouni, un Armentiérois de 29 ans, y est venu. Pour une centaine (!) de contrats intérimaires en tout, certains de quelques jours, depuis 2008. Puis, «l’agence d’intérim m’a fait savoir, en 2014, que j’étais sur une liste rouge, que Delacre ne voulait plus de nous », explique-t-il.
Pourquoi ? Parce qu’il a cumulé trop d’heures et qu’il aurait pu légitimement demander la requalification de son contrat en CDI. La loi prévoit qu’au bout de dix-huit mois d’activité cumulée, même avec des interruptions, le salarié peut demander à être embauché. Jusqu’alors, il n’y pensait pas trop, bien content de retrouver chaque année trois, quatre ou cinq mois de travail. « C’est ce qui est aberrant. Les intérimaires s’estimaient heureux de travailler alors que, clairement, la situation n’était pas normale », commente Dominique Bianchi, leur avocat.
Pour les plus anciens, dix-huit ans d’intérim
Les situations les plus anciennes remonteraient à dix-huit ans d’intérim. « C’est simple, ma femme, elle faisait soit Delacre, soit Décathlon, pour travailler presque toute l’année », explique le mari d’une ex-salariée.
Maintenant qu’ils sont aux grilles, à l’extérieur, sûrs de ne plus être autorisés à travailler chez Delacre, ces ex-intérimaires ont décidé de se rebeller. Et de demander leur dû, à savoir la requalification en CDI suivie du licenciement dans les conditions prévues par la loi. Ils ne se font guère d’illusions : pas question pour eux d’intégrer pleinement les effectifs de la société, mais de considérer que ce qui s’est passé équivaut à un licenciement, donc d’obtenir les primes qui en découlent.
Concrètement, c’est leur combat. « On veut toucher ce à quoi on a droit », résume Jamal. C’est-à-dire ? Demander à la société d’intérim le règlement de primes d’habillage, de vacances, le rappel treizième mois et l’incidence congés payés, et à United biscuits, propriétaire de Delacre (voir ci-dessous) une indemnité de requalification du contrat, mais aussi des indemnités de préavis, de licenciement et des dommages et intérêts. La somme s’annonce rondelette. Enfin, si la procédure aboutit dans le sens espéré par ces ex-intérimaires.
Pour une dizaine de salariés, c’est ce que Me Bianchi va défendre. Une audience était prévue le 28 janvier, elle a finalement été reportée au 8 avril, au conseil des prud’hommes d’Hazebrouck. « C’est de l’esclavage moderne. Delacre a un besoin permanent d’intérimaires, c’est contraire à la loi », précise-t-il.
La direction de Delacre n’avait pas donné suite en mai à nos questions. Pas davantage cette fois-ci.
Delacre, un employeur de poids
Effectifs. Avec 330 salariés à Nieppe, United biscuits est l’un des gros employeurs du secteur. Lorsqu’elle avait ouvert ses portes à La Voix du Nord en 2011, la direction avait expliqué à l’époque (elle n’a pas donné suite à nos demandes, ni en mai 2014, ni en ce début d’année 2015) qu’en pic de production, cet effectif pouvait atteindre 500 personnes et avait évoqué le chiffre de 11 500 tonnes de biscuits fabriqués par an à Nieppe.
Historique. La société Delacre existe depuis 1891. Elle est implantée à Nieppe depuis 1961, sur le site de la rue Bellevue. Elle a été rachetée par le groupe United biscuits industries en 1998, mais a gardé son nom et sa marque.
Groupe. Le groupe United biscuits a été fondé en 1948. Il s’agit d’un groupe anglais, dont le siège est situé à Hayes, dans le Middlesex. Le groupe emploie 6 500 salariés dans le monde, répartis sur dix-huit sites industriels, dont celui de Nieppe.
Produits. On connaît Delacre en France et en Belgique pour ses biscuits pâtissiers recouverts de chocolat : Delacre Tea Time, Namur, Délichoc mais aussi les Cigarettes russes, les Sprits et les Spéculoos.
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